L’homme politique et leader de Social Democratic Front (SDF) est décédé dans la nuit du 12 juin 2023 à Yaoundé à l’âge de 82 ans des suites d’une longue maladie, a annoncé son parti. Cet opposant historique au président Paul Biya a marqué la politique nationale de son pays par son courage au moment où l’ouverture démocratique était encore une illusion au début des années 1990. Il s’en va ainsi alors qu’il attendait le congrès de son parti, les 28, 29 et 30 juillet 2023 prochains au cours duquel il devait acter son retrait définitif de la vie politique. Portrait.
Ce libraire anglophone incarne dans la décennie 1990 l’opposition radicale au président Paul Biya. John Fru Ndi naît en 1941 à Baba II, un village du Mezam, près de Bamenda, dans l’actuelle région du Nord-Ouest, qui est, à l’époque, le Northern Cameroon, un territoire administré par le Royaume-Uni sous mandat de la Société des Nations.
Parti étudier au Nigeria, il revient à Bamenda où il exerce plusieurs professions dont celle de libraire. À la fin des années 1980, il fait ses premières armes en politique sur une liste RDPC, à l’époque parti unique.
Il a presque 50 ans quand il participe à la création du Social Democratic Front (SDF). Il n’est pas le premier choix, mais accepte d’en prendre la présidence, malgré les risques. Le 26 mai 1990, à Bamenda, le rassemblement inaugural du nouveau parti est réprimé dans le sang.
John Fru Ndi se forge l’image d’un leader courageux qui ne recule pas. Son aura dépasse alors les régions anglophones. Il devient populaire dans les régions de l’Ouest et du Littoral où se trouve la capitale économique Douala.
« Deuxième » de la présidentielle 1992
Durant les années 1990 et 1991, marquées par le mouvement des villes mortes, jusqu’à la première présidentielle pluraliste de 1992, il représente l’espoir pour ceux qui veulent le changement autour des slogans « Biya must go / Biya doit partir » et « Power to the people/ Le pouvoir au peuple ».
Déclaré perdant, John Fru Ndi conteste les chiffres officiels qui le donnent second. Il boycotte la présidentielle de 1997, se présente à nouveau contre Paul Biya en 2004. Puis, une nouvelle fois, en 2011, sa dernière campagne.
Au fil des ans et de choix contestés au sein de sa formation et de sa base électorale, son poids politique s’étiole.
Parce qu’il veut dialoguer avec le pouvoir, parce qu’il veut être le leader officiel de l’opposition, « le chairman » n’est plus perçu comme assez radical. Une partie de militants aux ambitions non dévoilées conteste le choix Joshua Oshi comme candidat aux présidentielles de 2018 et se déportent vers le MRC. Un départ jugé tribal par une certaine opinion et observateurs de la classe politique au regard de l’appartenance régionale de ces militants très proche de celle du leader de ce parti enrôleur. La crise anglophone qui ne facilite pas les choses au SDF vient perturber la mobilisation dans son bassin d’électeurs dans le NoSo.
Contre la partition du pays et partisan avec son parti du fédéralisme pour un meilleur développement des différentes régions du Cameroun, John Fru Ndi a gardé la tête de son parti durant 33 ans, jusqu’à sa mort. Il s’éteint sans avoir connu le changement auquel il aspirait à la tête de son pays.
Source: Rfi et mibiamafrica.alc-digital.com