L’une des plus grandes victimes des casses de Dikolo et la plus en vue dans la lutte pour la réparation et le rétablissement dans leur droit, ce septuagénaire qui a vu son patrimoine immobilier se transformer quelques minutes en gravats et les 21 autres victimes décédées suite au traumatisme lié à cette tragédie, nous parle de la commémoration de cet évènement qui se tiendra le 14 mai prochain et des promesses non tenues et encore attendues du gouvernement.
Nous sommes à la veille de la célébration du 1er anniversaire de la catastrophe de Dikolo. Sous quel signe placez-vous cet évènement ?
C’est un acrobate ou un clown qui veut interpréter son numéro devant les spectateurs, il est obligé de garder son sourire, même si à travers ce sourire, il se meurt. C’est extrêmement douloureux en cette veille de commémoration parce que nous voulons faire passer un message de cette injustice que nous avons subite. Nous sommes dehors. Nous avons été chassés comme si nous n’étions pas des camerounais. II n’y avait pas eu de préalables. Et même, quand vous chassez les autochtones chez eux ayant des titres fonciers légaux sur leurs terres, on se pose bien des questions de savoir qui a envoyé les gens nous détruire. Nous sommes déracinés. C’est nous qui devons raconter l’histoire de notre village. A partir du moment où nous y sommes plus qui va le faire ? Et ce village appartient à Rudolph Douala Manga Bell où il a passé quelques heures chez ma mère lorsque ses geôliers lui ont permis d’aller dire aurevoir à son peuple avant sa pendaison. Ces terres sont donc d’un grand symbole pour nous. Normalement, elles auraient pu servir de lieu de pèlerinage pour nos populations et celles d’ailleurs friandes de l’histoire. Malheureusement, c’est comme si l’histoire une fois de plus se réécrit. Cette fois ci, ce sont les camerounais eux-mêmes qui viennent pendre Douala Manga Bell en chassant sa famille qui heureusement est chez elle. Et quand vous tapez sur un enfant, vous n’allez pas lui refuser de pleurer. C’est pourquoi le 14 mai prochain, nous revenons sur nos terrains nous lamenter et demander au bon Dieu que justice soit faite.
Au-delà de cette manifestation qu’il y aura, qu’attendez-vous d’autres à cette date précise ?
Nous croyons fortement à la justice de notre pays. En même temps, nous espérons que notre cri parviendra au chef de l’Etat. Vous savez au plus fond du désespoir, tout homme a besoin d’espérer. Même si c’est une promesse. Quand le gouverneur de la région du Littoral, Samuel Ivaha Diboua, dit qu’il a déposé le rapport des résultats de la commission ad hoc commandé par le président de la république à qui de droit. Ce sont des termes politiques. Qui de droit c’est qui ? Nous osons croire que c’est le Chef de l’Etat. Mais le connaissant magnanime, nous nous doutons que le dossier lui soit déjà parvenu au regard de la vie misérable que nous vivons.
Vous êtes l’une des rares victimes que nous voyons au-devant de la scène. Que sont devenus les autres victimes de cette tragédie ?
Les autres victimes se cherchent. Elles sont partout et nulle part. Plus d’une vingtaine sont décédées. Leurs enfants doivent-ils les suivre ? Il y a un proverbe bantou qui dit dans un troupeau de brebis conduit par un lion, ce troupeau peut convaincre un troupeau de lions conduit par une brebis.
Y-a-t-il eu des actions concertées ?
Pas du tout. C’est plutôt le mutisme total. Les habitants de Dikolo illégalement déguerpis sont des personnes pacifistes. Nous continuons à mener les actions pacifistes jusqu’à ce que nous voyons l’issue de ce problème à travers de nombreux promesses qui nous ont été faites .
Recueillis par Félix EPEE
Quelle honte !!!
Maudits soient ceux qui pensent pouvoir se faire de l’argent sur le sang des autochtones