Plus d’une centaine de personnalités africaines et mondiales ont signé une pétition l’appelant à ramener la paix sociale effritée depuis sa volonté de se représenter aux prochaines élections présidentielles de 2024.
Un troisième mandat pour Macky Sall ? Ça ne passe pas aux yeux de la majorité des sénégalais. De nombreuses manifestations se sont multipliées depuis quelques temps à travers le pays de La Teranga pour s’y opposer. Violemment réprimées par la police, ces mouvements portés par les leaders politiques et de la société civile ont créé une tension sans précédent dans le pays. Et un an des présidentielles le risque d’une escalade est énorme avec une menace qui pèse sur sa stabilité.
C’est face à cette dégradation du climat social dans ce pays qui est considéré comme un exemple d’alternance de démocratie en Afrique francophone que les intellectuels de par le monde se sont mobilisés pour interpeler le président sénégalais. Ils sont plus de 100 intellectuels, sénégalais et d’autres pays du monde, qui ont signé une pétition demandant à Macky Sall à revenir à la raison. Non seulement renoncer à briguer un troisième mandat, cesser les violations des droits mais aussi arrêter l’instrumentation de la justice mise en œuvre pour museler tous ceux qui s’opposent à son projet.
Cette invitation de l’intelligentsia africaine et mondiale au chevet du Sénégal malade suscite néanmoins des interrogations. Elle, habituée au silence et très souvent peu impliquée dans la vie politique et citoyenne. Alors qu’est ce qui peut expliquer cette mobilisation des intellectuels?
Pour Arona Coumba Ndoffène Diouf, ministre conseiller spécial auprès du Prédisent Macky Sall depuis 2012, le problème est plus moral que juridique. « La morale nous interdit de nous dédire. Macky Sall a fait une déclaration selon laquelle il n’a que deux mandats et tous les Sénégalais ont approuvé. Il n’a pas le droit de décevoir, ni de se dédire ». Il se rappelle que ce sont ces déclarations qui l’ont motivé, de rejoindre le combat contre les deux mandats consécutifs d’Abdoulaye Wade. « Il n’est donc pas question de faire marche en arrière et de ravaler ses propos », a déclaré à Seneweb, cet ancien membre de la coalition présidentielle, Benno Bokk Yaakar, en wolof, « Unis par l’espoir », qui vient de claquer la porte.
Même son de cloche pour le chroniqueur Ciré Sy. L’analyste politique également candidat à la Présidentielle 2024 met en évidence la force de la parole et intime au Président Macky Sall, en fin de mandat, de libérer les sénégalais. « Les sociétés africaines sont orales. Et du point sociologique et anthropologique, notre constitution, c’est la parole et la sacralité de la parole », a-t-il annoncé dans « Objection », une de ses chroniques diffusées sur Sud Fm, une radio urbaine sénégalaise.
A ces multiples interpellations dont certaines venant du propre camp présidentiel, se sont joints celles d’autres intellectuels africains et du monde de poids. Notamment, le Prix Nobel de la littérature Wolé Showinka, Aminata Traoré, Kwame Anthonny Appiah, le professeur émérite de linguistique Noam Chomsky entre autres.
Macky Sall prêtera-t-il une oreille attentive à cet appel des intellectuels ? « Pas certain », s’accordent à dire de nombreux acteurs et observateurs de la scène politique sénégalaise. En plus, plusieurs indications, amènent à penser, à une troisième candidature aux présidentielles de 2024 du président sénégalais. Déjà, à un an du scrutin, il ne s’est pas encore prononcé. Et son parti, l’Alliance pour la République (APR) n’a jusque-là pas dévoilé son candidat. Envisage-t-il présenter un nouveau visage en si peu de temps et mobiliser les troupes autour de la personne de ce dernier ? Hypothèse peu réalisable. D’autre part, les divisions observées dans la coalition présidentielle où certains membres influents se sont retirés pour présenter individuellement leur candidature, démontre que le divorce avec leur leader est consommé.
En politique, les discours de promesses sont dans la majorité des cas peu réalisables. Car, le pouvoir est un engrenage où les convictions et les promesses s’envolent quand l’élu prend place. Macky Sall, serait-il pris dans l’engrenage du pouvoir ?
Félix EPEE