Chronique : Douala, ses eaux et nous.

Administrateur

Nous sommes déjà au mois de juin. Les grandes pluies s’annoncent avec leur lot de déboires et de malheurs engendrés par les inondations qui s’en suivent. Des pertes en vies humaines et matérielles. Favorisant en même temps les maladies hydriques comme le choléra et d’autres infections (dermatite, pneumopathie,) dues aux rejets urbains en ces temps de pluie en état de devenir un danger sanitaire pour les populations en raison des contaminants qu’ils peuvent véhiculer (ordures ménagères, matières fécales, huiles industrielles, …).

Les risques auxquels sont exposés les populations de la ville de Douala à chaque saison des pluies par l’absence, non seulement, d’une politique d’aménagement appropriée, d’une mauvaise gestion des eaux pluviales, mais aussi à l’incivisme des populations auquel on peut adjoindre, l’incurie et la cupidité de certaines de nos autorités insensibles aux souffrances de leurs concitoyens. Il y a aussi les effets du changement climatique qui déjouent quelques fois toutes les prévisions émises par les décideurs.

Les chiffres sont là pour confirmer notre thèse. Sur 250 kilomètres de drain à Douala, seulement 70 kilomètres sont aménagés. Très insuffisant pour une si grande métropole comme Douala. Au regard de l’importance de ces canalisations bétonnées qui augmentent la vitesse de ruissellement et la concentration des flux d’eaux vers les points bas. Car, sans elles, la pluie ruisselle sur les routes et lessive les terres.

Ces ruissellements sont très souvent à l’origine des éboulements des terrains dans certains quartiers de la ville de Douala où l’on observe une absence criarde ou du moins une présence insuffisante des équipements urbains. De quoi nous interroger sur le choix des priorités dans les travaux d’aménagement auxquels est soumis la ville de Douala très exposée aux inondations. Les déferlements d’eaux qui, dans le pic de leur débit, détruisent ponts et routes déjà insistants avec risque de ramener la ville au stade de l’âge de la pierre entrainant ainsi d’autres dépenses supplémentaires pour leur reconstruction qui auraient pu être orientées ailleurs.

Pourtant, ce genre de dégâts peuvent être évités, si les autorités qui ont la charge de cette ville tiennent compte, dans leur politique d’aménagement, des fonctions traditionnelles liées à la gestion des eaux pluviales. Celles de protéger les biens et personnes contre les inondations, préserver leur santé et leur sécurité, préserver et favoriser les milieux naturels. Une approche globale intégrant à la fois les enjeux techniques, sociaux, économiques et environnementaux que devrait adopter la mairie de la ville de Douala. Il s’agit principalement de stocker, d’infiltrer, d’évacuer et de filtrer.

Malheureusement, la majorité des bassins d’infiltration et de rétention d’eau et la mangrove susceptibles de protéger la ville des inondations sont occupés par les habitations. Les titres de propriétés y sont octroyés à des tiers par quelques hauts dirigeants de ce pays à l’insu des autorités municipales compliquant de fait leur travail sur le terrain. Les décisions étant prises sans elles sur certains problèmes fonciers de cette ville pourtant sous leur direction. Des pratiques je-m’en-fichistes qui contribuent à maintenir la plupart de nos villes dans un état rétrograde, loin de la discipline et du respect des espaces publics observés sous d’autres cieux donnant par conséquent aux visiteurs étrangers une image d’une cité mal structurée et désordonnée. Celle du pays comprise.

L’autre phénomène, qui perturbent les écoulements des eaux et participent éventuellement à l’accroissement des risques d’inondations dans la ville de Douala aujourd’hui, est la multiplication des immeubles avec des infrastructures souterraines qui provoquent la remontée de la nappe favorisée par le tassement des terrains . D’où l’intérêt pour la ville de Douala de mettre sur pied, si elle n’existe pas, une gouvernance de gestion de l’eau souterraine pour limiter les risques et les conséquences qui peuvent s’en suivre.

La pluie est à l’origine des cycles hydrologiques. En ville, c’est elle, par ailleurs, qui réalimente les ressources en eau. C’est également elle qui provoque des inondations.

La connaissance de la pluie est donc nécessaire pour gérer efficacement les eaux urbaines. Et seules ces observations denses, à court, moyen et long terme peuvent permettre de comprendre la pluviométrie d’un territoire et ses évolutions.

A Douala, à part des données de la météo qui servent d’avertisseurs, aucune autre étude n’est entreprise. Même celle du climat qui subit des changements imprévus depuis quelques années avec des conséquences sur la pluviométrie. 

Il est donc extrêmement important pour la ville de Douala, en plus des travaux régulièrement effectués qui ne doivent pas être négligé, d’essayer de prévoir comment le risque pluvieux va évoluer au cours des décennies avenirs en mettant sur pied un observatoire de la pluviométrie afin de mieux prévenir et combattre efficacement les inondations. Même si cette connaissance n’est pas un gage permettant de prévoir avec certitude les évolutions futures, elle demeure néanmoins une source d’information assez utile pour la ville et ses dirigeants.

Félix EPEE

Partager Cet Article
Laisser un commentaire